13 novembre 2019

Le chirurgien robot Karel Decaestecker: “on apprend à sentir avec les yeux.”

Si la chirurgie robotique suscite encore le scepticisme chez certains, Professeur Decaestecker y déjà intéressé lors de sa formation en Urologie.

Si la chirurgie robotique suscite encore le scepticisme chez certains, Professeur Decaestecker y déjà intéressé lors de sa formation en Urologie. Il est convaincu que le chirurgien sera toujours au volant, tandis que les robots joueront un plus grand rôle de soutien, rendant la chirurgie plus sûre et plus précise.

Moins invasive

La chirurgie a énormément évolué ces dernières années. Prof. Decaestecker: « Le temps où le chirurgien devait ouvrir le ventre du patient de haut en bas pour effectuer des opérations complexes est terminé ! La première révolution était la laparoscopie où de petites incisions sont pratiquées pour introduire des portes-instruments par lesquels seront glissés des instruments chirurgicaux. De cette façon, le patient a moins de douleur et de plus petites cicatrices, et il bénéficie d’une période de convalescence réduite. Le chirurgien est, cependant, confronté à des limites, vu le fait que les instruments n’ont pas d’articulations et que ces opérations mettent à rude épreuve son endurance physique. La deuxième révolution – l’assistance du robot pendant ces laparoscopies – a  éliminé bon nombre de ces limitations. Le chirurgien dirige le robot à l’aide de manettes (leviers et pédales) et le robot transmet les mouvements complexes sur les instruments miniatures à l’intérieur du corps. (voir vidéo) Les avantages pour le médecin et le patient sont nombreux: le chirurgien a une vue parfaite (3D, agrandie et stable), il travaille avec des instruments pratiques et des articulations du poignet, ce qui lui permet d’effectuer de longues opérations jusqu’au bout. Une opération assistée par un robot se révèle moins invasive pour le patient, ce qui se traduit en un résultat plus esthétique, moins de douleurs, de perte de sang et de complications et une récupération plus rapide. »

Robotchirurgie 2

Big data et IA

La troisième révolution est celle de l’intelligence artificielle (IA) et de l’intégration de l’imagerie et des big data dans la console du robot.

Decaestecker: « Les machines peuvent apprendre rapidement à partir des données du patient. Prenez, par exemple, un patient dont vous disposez d’un scan. Grâce aux constructions 3D et à la Réalité Virtuelle (RV), vous pouvez mieux comprendre l’anatomie spécifique de ce patient, ce qui vous permet de préparer une opération complexe à l’avance et d’obtenir ainsi un meilleur résultat. Cette planification préopératoire est, par exemple, très importante pour l’ablation d’une tumeur rénale lorsque vous êtes soumis à une forte pression du temps, car le rein meurt progressivement lorsque l’artère est clampée trop longtemps. Pendant l’opération elle-même, le chirurgien peut utiliser la réalité augmentée (RA) pour placer des images sur les tissus en temps réel. Comme une sorte de GPS, le robot donne également au chirurgien certaines instructions et options pour ajuster sa stratégie chirurgicale. Il y a là un énorme potentiel pour rendre la chirurgie encore plus sûre et plus précise. »

Formation

La réalisation d’une opération assistée par robot nécessite une formation, tout comme conduire une voiture. Il ne suffit pas de s’asseoir derrière la console et de penser que ça va aller tout seul.

Decaestecker: «  J’ai eu besoin de presque un an pour me familiariser avec tous les leviers, les pédales et les boutons (buttonology) et d’apprendre à les utiliser.
Pour l’instant, on n’a pas de feedback du robot et on ne peut pas (encore) sentir avec les doigts, mais techniquement cela devrait être possible. Cependant, on a une très bonne vision qui fait qu’on apprend à sentir avec nos yeux.  On sait voir les réactions des tissus à nos mouvements et on peut donc les perfectionner. »

Pionnier

« La chirurgie robotique se prête également parfaitement à la formation: les chirurgiens stagiaires peuvent suivre les opérations jusqu’au moindre détail sur grand écran, ce qui leur permet de voir l’anatomie, la dissection des tissus et les différentes étapes de l’opération. Ils s’entraînent d’abord sur des simulateurs via VR, puis sur des modèles imprimés, ensuite sur des modèles animaux et des cadavres humains, et enfin sur des humains vivants. De cette façon, la nouvelle technologie est intégrée en toute sécurité dans les soins aux patients. L’objectif de l’Académie Orsi est de donner aux chirurgiens la possibilité de s’optimiser en chirurgie robotique. C’est grâce à elle que nous sommes le précurseur absolu dans ce domaine. »

Rentable

« La chirurgie robotique a non seulement un énorme potentiel pour une chirurgie plus sûre, mais aussi pour une rentabilité sur le plan social. Tout cela semble très coûteux, mais si vous regardez l’ensemble, vous constaterez qu’il y a moins de complications, que les patients se rétablissent plus rapidement et reprennent plus vite le travail. De plus, cela nous permet d’avoir beaucoup plus de chirurgiens qui offrent la même qualité ayant été formés d’une manière standardisée. »

Des robots autonomes ?

« Je ne crois pas qu’un jour les robots fonctionneront de façon autonome. Mais c’est vrai qu’il y a dix ans, on ne croyait pas non plus aux voitures automotrices. En attendant, on a tous un GPS existe et il y a de plus en plus d’IA dans tout. Et pourtant, je pense que le chirurgien sera toujours au volant. »

Karel


Après ses études de doctorat, le professeur Decaestecker s’est spécialisé en urologie et en chirurgie robotique. Pionnier de la transplantation rénale robotisée, il donne des formations  à l’Académie Orsi et dans toute l’Europe. Au printemps 2016, son équipe et le chirurgien thoracovasculaire Dr Liesbeth Desender ont réalisé la première greffe de rein assistée par robot en Belgique. Il est professeur d’uro- oncologie UGent/UZ Gent et chef des cliniques d’uro- oncologie UZ Gent – Uro-Ocologie de la vessie et des tumeurs rénales – Chirurgie robotique – Transplantation rénale.


Dernière mise à jour le 13/11/2019

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